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Mes souvenirs à partager: une jeunesse en Afrique Equatoriale Française AEF, Une vie de famille, et la suite...

Tome 3 (DAI). Découverte d'une Afrique Indépendante PP11-21

Tome 3 (DAI). Découverte d'une Afrique Indépendante PP11-21
Tome 3 (DAI). Découverte d'une Afrique Indépendante PP11-21

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Visite de la ville de Yaoundé 1978

 

   Etant donné que la ville de Yaoundé va occuper un peu plus de cinq ans de ma vie, soit à travers les trois missions évoquées ici qui se sont développées entre 1978 et 1980, soit à travers un séjour de longue durée de 1980 à 1983 que j’effectuerai en famille, soit enfin au cours des vingt années suivantes à l’occasion de multiples missions, je crois utile de situer les principaux quartiers vers lesquels mon récit nous conduira selon les évènements.

    La promenade évoquée ci-dessus en ce dimanche matin suivant notre arrivée nous a conduits au point 50, Cathédrale Notre Dame des Victoires, on peut considérer qu’il s’agit du centre de la ville… Je suis tenté de dire de la ville Blanche, de la ville Coloniale !

   Pour décrire cette ville, je vais suggérer que l’on plaque sur le plan une main droite, avec la paume sur le centre, Mvog-Ada, alors,…

   Les doigts, que nous suivrons successivement, indiqueront des rues et avenues qui se développent en étoiles depuis le centre-ville. Chacune de ces avenues sont en fait séparées par un ruisseau, autant d’Oueds, descendant du cirque des collines qui cerne la ville par le nord et convergent vers la paume de la main…

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   Le pouce, est orienté vers l’Est, selon le Boulevard de la Réunification, prolongé par la rue de l’Université et la rue de Mélèn, ce secteur est pour nous important. La rue borde le secteur de l’Université de Yaoundé, le long de Ndjong-Mélèn, sur la gauche se trouvent l’Ecole Polytechnique, et au-delà, vers l’extérieur, le CUS Centre Universitaire de la Santé. C’est par là qu’au cours de cette première mission nous gagnâmes la route de Kribi…

Bureau de la Direction de l’ENSP, En 1978…

Bureau de la Direction de l’ENSP, En 1978…

   A l’époque, le boulevard de la Réunification est le lieu des défilés à l’occasion de la fête Nationale (le 20 Mai, si ma mémoire est bonne ?) qui commémore la réunification des deux « Cameroun », le Cameroun Francophone arraché à la France et le Cameroun Anglophone arraché quant à lui à l’Empire Britannique…

    Cinq ans plus tard, l’extension de l’Ecole enfin achevée, la Direction sera transférée dans un bâtiment beaucoup plus vaste, installé sur la butte d’où est prise la photo, alors occupée par les paillottes de quatre ou cinq familles.

   A l’extrémité Sud-Est du Boulevard de la Réunification s’élève un étonnant monument, un père portant de jeunes enfants fait face à un gigantesque escargot symbolisant l’enlacement vers le ciel des deux Camerouns l’Anglo et le Franco…

Monument de la Réunification.

Monument de la Réunification.

   . Plus tard, j’ai cru comprendre que cette réunification postcoloniale était essentiellement un regroupement ethnique.

    Lorsque vous circulez sur la Ring-Road, au-delà de Bamenda, les vêtements traditionnels arborés ici ou là, par tels ou tels notables, sont d’une facture indiscutablement bamiléké…

   Dans l’axe de cette statue, dans la pente qui descend vers d’Avenue Charles Atangana sont lovés les bâtiments de l’Ambassade de France (non mentionnée sur ce plan !).

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    Revenons à cette main droite plaquée sur le plan… l’Index s’oriente vers le boulevard Manga Bell. Sur la droite le quartier Grand Messa où plusieurs immeubles offrent des appartements aux collègues nationaux, des appartements pour la bourgeoisie naissante dans le fonctionnariat, puis Mokolo et le grand, l’immense marché Madagascar. En poursuivant, on s’oriente vers l’ouest Edéa, Douala, vers l’océan.

    Nous avons laissé sur la gauche, « Le Lac » qui fait face de droite à gauche à l’hôtel des Députés, au Ministère de l’Enseignement et au Ministère de la Fonction Publique..

Le Lac bordé par les ministères Fonction Publique, Enseignement,…

Le Lac bordé par les ministères Fonction Publique, Enseignement,…

    A l’époque, sur la rive ouest se trouvait un club « Nautique » animé principalement par une grosse dizaine de familles de « Blancs », une ethnie complètement nouvelle pour moi, « des Coopérants »… On voit sur la photo une planche à voile, j’ai eu l’imprudence inconsciente de pratiquer ce sport sur le dit plan d’eau, cette année-là (1978) ! Peu d’années plus tard, au début des années 80, il ne fut plus question de se risquer à ce genre de pitrerie dans de telles eaux… Le lac est en effet situé juste en aval de l’hôpital général qui déverse dans celui-ci les eaux usées non traitées…

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    Le Majeur posé sur le plan nous fait parcourir l’Avenue du Président Ahidjo, l’Avenue Foch, la rue Essomba Sébastien ? Là, la … de notre temps l’avenue Tsinga.

    A gauche de Tsinga, se trouve la Briquèterie, le quartier musulman, avec la Grande Mosquée, l’avenue du sultan Njoya, un notable Bamoun ! (nous y reviendrons…). En fait, c’est là, tout près que se trouve la case du Directeur de Polytech … Nous y reviendrons aussi.

Entrée du chantier des chinois : Le futur Palais du Peuple

Entrée du chantier des chinois : Le futur Palais du Peuple

   En poursuivant l’Avenue de Tsinga, vers le nord, on contourne, par la gauche une colline imposante, ceinte à l’époque d’un mur de tôles ondulées limitant un mystérieux chantier animé par des chinois. Chaque midi de sourdes détonations se faisaient entendre ! La rumeur publique évoquait la construction d’un « Palais du Peuple ». Le cliché joint montre d’une part un troupeau de bovidés, d’autre part un portique agrémentant l’entrée du chantier chinois.

   Pendant les premières années, 78-80, nous ne vîmes de ces ouvriers chinois que des hommes, que de rares promeneurs du dimanche, qui marchaient ici ou là, toujours par deux, ne s’adressant à quiconque…

   Quant aux troupeaux de bêtes à cornes, qui circulaient du nord au sud, ils n’étaient là que pour être mangés, en effet, en Afrique équatoriale, point d’élevage de bovins qui ne supportent pas dans ces zones la Tsétsé. Cela je le savais de mon enfance Congolaise, je savais même une exception à cette règle, celui l’élevage de vaches laitières mis en œuvre par d’anciens maquisards français ayant émigrés à la fin de la guerre pour créer à Baratier, au Moyen Congo dans le Kouilou Niari une ferme, un ranch, une folie ! La légende voulait que chaque boy, ayant travaillé dans l’élevage un certain nombre d’années, retourne au village avec deux génisses et un jeune male. Quelle est la part de réalité de cette légende ?

    Les troupeaux évoqués ci-dessus étaient élevés au Nord-Cameroun, notamment par les « Peul » dans la zone sahélienne et envoyés à l’âge adulte le long des routes vers le sud, pas uniquement le sud du Cameroun, mais aussi vers le Gabon et le Congo Brazzaville.

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    Mais, revenons au plan de la ville, et orientons nous selon l’Annulaire, le long de l’Avenue Adenauer, nous laissons sur la droite le Tennis Club et sur la gauche les bâtiments de la Primature (Premier Ministère) ainsi que ceux de « Cameroun Tribune » la presse nationale majeure… Au Carrefour de Nlong Kak on oblique sur la gauche vers le quartier Bastos.

   Bastos est le quartier des « blancs », notamment cette nouvelle tribu que je découvre peu à peu au cours de ces premières missions, les « Coopérants ».

   On ne peut qu’habiter à Bastos… Devant mon étonnement, on m’explique qu’en cas de coup dur, les services de l’Ambassade (de France) peuvent plus aisément organiser le regroupement et les évacuations des ressortissants français.

   Ce que j’ai omis de préciser au début de ce chapitre, est que le vol Roissy-Yaoundé que nous avons emprunté s’est déroulé au cours du 3ème weekend de mai 1978… Or, que faisait la Légion Etrangère au cours de ce même weekend ? Elle sautait sur Kolwezi …

    Au cours de la semaine qui suivi lors de discussions, avec tel ou tel coopérant, il m’est clairement apparu que ces histoires de possibilités de regroupement pour évacuation n’étaient pas un délire de petite communauté isolé, mais une simple réalité, un risque consciemment couru par les coopérants.

   Continuons notre périple à travers la capitale du Cameroun…

    Nous laissons sur la gauche la bretelle menant notamment à l’Usine Bastos, mais aussi à quelques immeubles accueillant des coopérants, et poursuivons vers le nord. Nous contournons cette fois par l’Est la colline du mystérieux chantier des chinois, et bifurquant vers le nord nous empruntons la large boucle enfermant le fameux Hôtel du Mont Fébé.

    Le Mont Fébé est le grand hôtel de la ville, possédant piscine, restaurant, night-club ; le must de la ville, le piège à coopérants.

   Les arrivants, les en transit, sont logés au Mont Fébé . Les maris s’occupent dans la journée en ville, les épouses et les enfants font « cucu plage » au bord de la Piscine.

Façade du Mont Fébé Hôtel

Façade du Mont Fébé Hôtel

La piscine

La piscine

   Autant dire que c’est ici que sont cultivées, grossies, les rumeurs justes ou fausses qui parcourent la communauté des coopérants… Attention, il n’y a pas que des coopérants français, ce qui augure une possible inflation des rumeurs…

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    Venons-en enfin à la direction pointée par l’auriculaire, le petit doigt nous mène, au-delà de la voie de chemin de fer, vers les nouveaux quartiers d’Essos et surtout vers le grand stade « Ahmadou Ahidjo », l’un de ces nouveaux temples où se célèbrent occasionnellement les grand-messes à la gloire du Dieu « Foot »…

   A noter que dans ces stades, on ne vient pas voir que des matchs de football, se sont de plus en plus des concerts qui attirent les foules. A ce propos, il me revient une anecdote !

   Vingt ans plus tard, en 1997 ou en 1998, toujours à l’occasion d’une mission au Cameroun, au titre cette fois de l’Agence Universitaire de la Francophonie, je transite à Douala dans un hôtel en compagnie de Bruno de Lavenne, alors Directeur du Bureau Afrique Centrale de l’AUPELF-UREF.

    En cette fin d’après-midi, nous sommes attablés pour un apéritif salutaire, non loin de la piscine (en ces contrées, il y a toujours un fauteuil et une table près d’une piscine avec un bon whisky noyé de glaçons). Faute de trouver un espace libre, deux clients de l’hôtel sollicitent de s’assoir à notre table…

    La femme à l’abondante coiffure poivre et sel qui s’assoit est belle, forte, vigoureuse, l’homme, quant à lui, est non moins fort, vigoureux, il arbore d’une barbe blanche à poils courts qui fait le tour de sa tête, Je reconnais Jocelyne Béroard et Jacob Desvarieux que je vois en chair et en os pour la première fois. Kassav’ a débarqué à notre table.

   Je trouve la splendide Jocelyne, en vrai, un peu cabossée, fatiguée… J’avais ici ou là, à travers un poste de télévision, trouvé qu’elle avait un tout léger strabisme, un œil coquin qui de temps en temps prenait sa liberté… Mais là, c’est grave, mon frère, la femme-là louche vraiment, trop même !

   Je ne peux, comme toujours, garder pour moi un sentiment qui mérite éclaircissement. Sachant, par radio trottoir peut être, ou par Cameroun Tribune, que le groupe avait donné la veille un concert au grand stade de Yaoundé, j’interroge :

    - Le concert d’hier a été fatiguant, je présume !?...

   Un gros temps de silence s’installe autour de notre table, visiblement la diva peaufine une réponse…

   Enfin, elle finit par éructer :

     - Ils sont fous ces nègres ! Nous avons joué pendant deux heures, puis nous avons un peu prolongé, mais quand nous avons voulu plier bagage, ils ont tout cassé… tout cassé. Ils m’ont fait peur, même…

    Ce jour-là, j’ai eu confirmation que les histoires de Nègres étaient très compliquées.

    Me sont revenus à l’esprit les aimables diatribes qui fusaient lors de nos escarmouches dans le marigot du village, près des cases des évolués à Brazza, lorsque dans l’ardeur de nos jeux mes camarades africains me traitaient de « Cochon gratté ». Pour le profane qui n’a pas connu la gaité de ces jeux il convient de préciser que le cochon, là-bas est noir et que l’on imagine qu’en le grattant il deviendra blanc !....

   Comment voulez-vous que je vois le monde et les gens du monde avec les mêmes yeux que ceux qui étrangement ont vécu toute leur vie, en un même lieu…

(à suivre...)

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H
Bonjour Mr GUITARD, je vous ai eu comme professeur à l'ENSEM option Mécanique 1984-1986. Ensuite j'ai été enseignant VSN à ENSP Yaoundé - Département Mécanique 1986 - 1988. Ce tome 3 évoque pleins de très bons souvenirs . Merci
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D
Un Blanc qui réagit, c'est pas si courant !
D
Merci de ce commentaire ! Que deviens tu ?
G
Bien ! continues ...
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D
Injonction! OK! Je continue...
D
j aime beaucoup !<br /> j attend la suite ........<br /> MERCI MICHEL
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D
La suite vient petit à petit, les accouchements sont pour moi toujours très lents... Il faut que cela vienne, et on ne sait jamais quand.
D
Daniel, plus tard pour certains à Brazza, ce fut Jhonny... Guitare, bien sûr!