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Mes souvenirs à partager: une jeunesse en Afrique Equatoriale Française AEF, Une vie de famille, et la suite...

Tome 3 : (DAI) Chapitre 1.1 :Découverte d’une Afrique Indépendante (PP 1-10)

Chapitre 1 PP 1-10

Missions d’appui pédagogique vers l’Afrique (1978-1980)

Pour une fois, je voyage dans un siège A, avec le hublot à ma gauche, je préfère généralement un siège couloir qui permet, sans déranger quiconque, de se lever à son gré. J’entrebâille le volet et suis aveuglé quelques instants par la violente lueur ; nous survolons le Sahara, plein Sud, de splendides vallées désertiques, jaune ocre, scarifient l’immensité du désert. Je referme le volet et retourne à ma paisible somnolence, à mes rêveries.

Un paysage lunaire, le Sahara…

Un paysage lunaire, le Sahara…

Ce voyage a quelque chose de différent des précédentes missions que j’ai effectuées en Europe, en Amérique du Nord ou au Proche Orient, en effet, pour la première fois depuis dix neuf ans, ce vol de l’UTA me ramène vers l’Afrique Equatoriale ; je rejoins le Cameroun, pour une mission d’appui pédagogique auprès de l’Ecole Nationale Supérieure Polytechnique de l’Université de Yaoundé (ENSPY).

C’est en fin juin 1959, tout fier de mon premier Bac en poche, que j’ai quitté cette Afrique Equatoriale Française (AEF), ce Moyen-Congo où je venais de passer les huit années de mon enfance, de mon adolescence.

Je voyage en compagnie d’un collègue, Jean Charles Chevrier, qui est en charge des Relations Internationales de notre établissement, l’Institut National Polytechnique de Lorraine (INPL). Nous rejoignons cette école d’ingénieurs pour assurer une mission d’appui pédagogique et scientifique auprès du jeune corps d’enseignants camerounais.

* *

*

… J’ai quitté l’Afrique Equatoriale, tout juste âgé de 17 ans, en juillet 1959, voilà que je retourne 19 ans plus tard, en Mai 1978, vers ces contrées de mon enfance…

Le volet de mon hublot est toujours abaissé.

- Que vais-je trouver ?

- Que sera cette Afrique, après 19 ans… d’Indépendance ?

J’ai quant à moi, tellement changé ; marié à Béatrice, père de quatre enfants, maintenant Professeur des Universités de 2ème Classe (avant la dévaluation des fonctions, on disait « Maitre de Conférences » !).

Que sont devenues nos anciennes colonies ? Elles ont comme moi certainement vieillies ! Mais, Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire ?

Concernant le Moyen Congo, j’ai suivi de loin en loin les péripéties de son évolution. Ce territoire est devenu le « Congo-Brazzaville », face au « Congo-Kinshasa » ex-Belge, futur « Zaïre ».

La République Populaire imposée par le Capitaine Marien Ngouabi a pris la suite des hésitations malhabiles de l’Abbé Youlou Fulbert (60-63) et de la glissade vers le socialisme promue par Massemba Débat (63-68).

Le commandant Ngouabi présidera aux destinées de la République Populaire du Congo de 1968 jusqu’à son assassinat en 1977, au cours d’évènements qui emportent aussi l’Archevêque de Brazzaville et l’ancien président Massemba Débat.

Il n’est pas surprenant que mon attention ait été focalisée sur le devenir du Congo-Brazzaville. En effet, Louis et Yvonne, mon père et ma mère, faute d’avoir pu retrouver en métropole une réinsertion stable, sont repartis vers Pointe Noire en 1966, et, à l’heure où je somnole sur mon siège dans ce vol vers Douala, ils sont toujours à Pointe Noire. De façon indirecte, la continuité de ma propre vie et l’évolution de l’Afrique Equatoriale a été maintenue à travers mes parents…

Tout cela est bien beau, mais du Cameroun, j’ignore tout, ou presque…

Ce pays n’est présent dans mon esprit que par le souvenir évanescent de cette gazelle noire, représentante du territoire Cameroun aux jeux Scolaires et Universitaires de 1957 à Brazzaville… L’une de mes premières émotions amoureuses, nous avions aimablement flirté, pendant la quinzaine de ces jeux …

A titre plus général, le Cameroun est pour moi ce territoire qui, très tôt dans la guerre, avait accueilli le capitaine Philippe « Leclerc » de Hauteclocque et ainsi permis la formation du régiment de Marche du Tchad qui trouva la gloire à Koufra et vers le Fezzan…

Au cours des vingt dernières années, J’ai rêvé au rythme des exploits des Affreux, ces mercenaires qui se vendaient, ici ou là, au service de causes confuses, des Bob Denard…

Quelques participants de ces jeux scolaires et universitaires de Brazzaville En 1957… (Elle est à gauche la gazelle !)

Quelques participants de ces jeux scolaires et universitaires de Brazzaville En 1957… (Elle est à gauche la gazelle !)

Dans mon esprit, compte tenu de ce que j’avais vécu, ce n’est point la cause de ces mercenaires qui avaient une quelconque importance, c’était l’espoir de voir ces communautés noires profiter des chances multiples qui s’offraient à elles et que jamais elles ne savaient saisir…

J’ai mis de nombreuses années à comprendre l’immonde racisme qui submerge ces communautés africaines qui, à nos yeux de blanc, apparaissent comme une… Ils sont tous les même ! Ils sont noirs… disaient mes parents…, et pourtant, ils se craignent, ils ont peur les uns des autres, car ils sont différents, ils appartiennent à des ethnies qui se reconnaissent et que nous, pauvres blancs, n’étions pas capables d’imaginer, de discerner…

Un soubresaut de l’appareil me tire de ma somnolence, j’entrouvre un œil…

La voix éraillée du commandant de bord nous informe que sur la droite de l’appareil nous pouvons voir le sommet du Mont Cameroun ! La poisse habituelle me poursuit… Le siège A est à la gauche de l’aéronef ! Pour voir le mythique Mont Cameroun, il faut me lever, courir rapidement vers le hublot disponible au niveau de l’un des accès en milieu de cabine…

Trop tard, il est passé ce putain de Mont Cameroun ! J’ai beau écraser mon nez contre le hublot, je ne peux qu’entrevoir ce légendaire monument.

* *

*

Le Boeing 707 qui nous emporte vers Douala, commence une descente vers cette ville que j’ai abordée déjà au moins deux fois dans ma jeunesse…

Une première fois, 24 ans plus tôt, en septembre 1954, en provenance de Nice, via Tripoli, nous avions maman, mon frère Louis, ma sœur Dominique et moi transité par Douala à destination de Pointe Noire. Nous avions à cette occasion volés sur un DC3 …

Une seconde fois, trois ans plus tard, en juillet 1957, en provenance de Pointe Noire en route vers la métropole, ce fut à l’occasion d’une escale du Jean Marmoz.

L’aéronef sur la photo est bien de l’UTA, est ce vraiment un Boeing 707 ?

L’aéronef sur la photo est bien de l’UTA, est ce vraiment un Boeing 707 ?

Nous nous posons pour une escale d’une quarantaine de minutes. Nous n’avons pas eu à débarquer et très vite, avons redécollé à destination de Yaoundé.

Le souvenir que j’ai de ce premier atterrissage sur l’aérodrome de Yaoundé est une vibration énorme de la structure de l’aéronef occasionnée par un freinage sévère…

De cette émotion, de cette peur, à l’occasion de cet atterrissage, je n’aurai la compréhension claire que bien plus tard.

L’entrée de piste est située à l’immédiat sommet d’une petite bute et l’extrémité est aussi à l’aplomb d’une autre petite falaise. Toucher avant le seuil de piste n’est pas possible, rouler au-delà de l’extrémité de la piste est aussi fatal…

Conséquence de cette topologie de l’aérodrome, qui n’est pas perceptible par le passager, c’est le freinage sévère qui est ressenti en cabine à chaque atterrissage. Beaucoup plus tard, lorsque je serai moi-même pilote, je m’imaginerai les pilotes, debout sur les freins, scrutant anxieusement le bout de piste, espérant chaque fois que l’efficacité du freinage évitera le malencontreux débordement du bout de piste…

Nous voici à Yaoundé, Capitale politique du Cameroun.

Je crois me souvenir, sans en être tout à fait certain, que ce fut David Julien Bassop, Secrétaire Général de l’Ecole, qui vint nous accueillir en cette fin d’après-midi. Quand je dis fin d’après-midi, cela veut dire dix-huit heures, dix-huit heures trente, et comme nous sommes sous l’Equateur, à la tombée de la nuit.

Jean Charles et moi sommes convoyés vers ce qui sera au cours de la mission, trois semaines, notre « home », notre havre de paix…

* *

*

Nous sommes logés à l’Hôtel CENTRAL, à cette époque, le CENTRAL est organisé autour de la Rotonde qui abrite le Restaurant.

En accédant à la concession[1] de l’hôtel, depuis la route, la Rotonde toute blanche, noyée sous un manteau de verdure, se déploie sur la droite, cernée par un déambulatoire circulaire couvert à l’abri duquel, dans la journée, les vendeurs de pièges à touristes installent sur le sol leurs innombrables bibelots, statuettes, ivoires, ébènes vrais ou faux, leurs gourbis ! L’espace intérieur abrite les tables du restaurant, animé par une armée de serveurs, engoncés dans des uniformes impeccables d’un blanc éclatant, dont les larges sourires permanents libèrent des rangées de dents blanches éclatantes Nous étions encadrés par des dizaines de Louis Armstrong.

Sur la gauche de l’entrée, le bâtiment d’habitation de l’hôtel est un double alignement de chambres superposées en rez-de-chaussée et en premier étage.

L’accès aux chambres s’effectue par des couloirs disposés le long de la façade opposée et chaque chambre est prolongée du côté de la façade visible par un petit balcon.

Les balustrades des balcons des chambres du rez-de-chaussée sont aisément franchissables… Nous y reviendrons !

Arrivés un samedi en soirée, le lendemain matin dimanche laisse aux missionnaires le loisir de découvrir la ville…

Après un copieux petit-déjeuner pris au « Central », Jean-Charles et moi entreprenons, à pied, une exploration du Centre Ville.

En sortant de l’hôtel, la rue revêtue, mal, mais revêtue tout de même, nous conduit le long d’un espace, ombragé sous un futée de majestueux eucalyptus, envahi par de hautes herbes, apparemment à l’abandon. Un examen plus attentif de ce terrain révèle l’existence de vielles tombes, qu’il s’agit d’un ancien cimetière ! Nous apprendrons un peu plus tard qu’il s’agit du cimetière allemand…

La découverte fortuite de ces sépultures nous fit prendre conscience du fait que le Cameroun fut, jusqu’à la fin de la première guerre mondiale, une colonie allemande, dépecée à la fin du conflit, pour une part, au bénéfice de l’Empire Britannique, qui rejoint le Nigéria, pour une autre part, au bénéfice de l’Empire Français, qui rejoint quant à elle les territoires de l’AEF (Afrique Equatoriale Française).

Les choses ne sont pas si simples, en effet, quelques quarante années plus tard, lorsque dans les années 60, les indépendances furent octroyées tant au Nigéria qu’aux territoires de l’AEF, au territoire du Cameroun Français vint s’agglomérer partie du Nigéria qui constituera la province de l’Ouest Camerounais, autour de Bamenda. Cette réunion est à l’origine du bilinguisme Camerounais. Français et Anglais les deux langues des anciens colonisateurs restent langues officielles du Cameroun.

Nous poursuivons la promenade matinale dans le sens de la pente descendante, sur la droite nous laissons le bâtiment de la Grand-Poste, sur le mur de laquelle plusieurs boites aux lettres extérieures nous sont familières, car ornées des initiales RF.

La pente nous conduit à franchir le petit pont qui enjambe la rivière cheminant le long de la vallée (Ruisseau qui a disparu, recouvert depuis par une chaussée de béton). Nous nous retrouvons face à la cathédrale qui trône sur la droite de la rue. Sur la gauche nous passons devant un super marché fermé en ce dimanche matin. Un pas plus loin, sur le même trottoir nous passons devant le Centre Culturel Français.

Pour illustrer mon propos, j’ai recherché une carte de la ville de Yaoundé. J’ai rejeté les cartes actuelles (37 ans plus tard) qui incluent des quartiers de Yaoundé qui n’existaient pas encore. C’est donc un document touristique de 1978 que je reproduis ci-joint.

Au sud de la ville, tout proche, se trouve l’Aéroport de Yaoundé, coincé, comme signalé plus haut, entre au Nord la route menant vers Akonolinga et au Sud celle vers Mbalmayo. On constate ici que la piste est coincée entre deux routes !...

[1] Concession : J’ai vite réalisé que cette expression m’était très personnelle ! Pour moi un terrain accueillant une maison en Afrique est sur une concession… Dans mon esprit, on n’est pas propriétaire du terrain, on est juste usufruitier du terrain qui nous a été concédé par le gouvernement général du territoire...

Là était un héritage de mon adolescence Africaine…

Le Yaoundé de 1978…

Le Yaoundé de 1978…

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